Ma mère était une adepte de la médecine parallèle, bien qu'elle soit dotée d'un caractère obtus, mais à neuf ans on ne voit pas les choses sous cet angle. Un jour elle me conduisit chez sa guérisseuse, pour une question qui m'échappe encore cinquante cinq ans après. Pourtant, je me souviens toujours être entré dans une salle d'attente bondée de pauvres personnes qui attendaient leur tour, une toute petite pièce, certaines patientes égrainaient un chapelet éclairées par des volets à claire-voie laissant passer quelques vieux photons de lumière grise. J'imaginerais bien ce lieu comme un purgatoire décrit par la religion catholique ou un sas de décompression pour âmes en quête de salut. Lorsque notre tour fut arrivé, j'ai dû entrer dans un bureau encore plus sombre dans lequel une vieille bonne-femme était installée portant une sorte de chéchia sur la tête, elle n'avait pas la beauté d'une pythie, mais elle en partageait la transe (napolitaine). Une fois assis, elle prit ma main et en promenant sur moi une médaille religieuse se mit à émettre des prières étranges qui se résumaient en une série de psipsipsipsipsipsipsi-marie, avec un refrain supplémentaire. Après avoir payé largement ce discours ésotérique et m'être sans doute soulagé d'un besoin pressant, elle annonça à ma mère que j'étais guéri et c'était vrai... Impressionné par cette profession, je me mis à me rêver guérisseur, faisant des psipsis tous les soirs au lieu de réviser l'histoire et la géographie. Malheureusement cette vocation a été largement contrariée par mon instituteur, d'où la rancune tenace qui m'anime encore contre ceux qui vendent du vent ou du rêve et ne font de mal qu'au porte monnaies de ceux qui les écoutent, ce dont je fais publiquement repentance (psi, si)
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